Bon, maintenant que vous en êtes entre la dinde et l’oie dans l’hécatombe des fêtes de fin d’année, ça me paraît un bon moment pour vous proposer un petit billet sur les animaux qui sauvent des vies. Cela permettra de boucler l’édition 2015 de ce blog sur une note positive et pas du tout culpabilisante.
La grande différence entre les animaux et nous, c’est que nous, on a une âme. Concrètement, ça ne sert pas à grand-chose, mais certains d’entre nous auront un jour l’opportunité de la vendre pour une fonction importante. Cela s’appelle « la réussite sociale ». Et s’il s’agit bien, en un certain sens, d’un pacte signé avec une puissance obscure, la chose n’adopte pas nécessairement la forme qu’on pourrait attendre d’une telle formule. Il faut davantage voir cela comme une concession faite à notre mode de vie.
Alors pendant que nous mettons en commun nos maigres ou puissantes ressources pour montrer chaque jour aux bêtes qui c’est le patron, voyons ce qu’elles font pour nous.
Parents imprudents, les gorilles s’occupent de vos enfants
Parce qu’on oublie trop souvent que les enfants sont stupides, il s’en trouva un en 1996 pour se pencher tellement dangereusement au bord de la fosse aux gorilles d’un zoo américain qu’il bascula dedans tête la première. Il eut cinq mètres de chute pour méditer sur son erreur avant de perdre connaissance en faisant celle du sol.
Entre l’intrusion soudaine de l’espace des gorilles, les cris apeurés du public et le brusque afflux de curieux accourant pour assister au combat opposant une bande de gorilles à un enfant de trois ans inconscient, la situation devint critique en un clin d’œil.
Fort heureusement, Binti Jua décida que son heure de gloire était arrivée. La femelle de huit ans, elle-même mère d’un petit juché sur son dos au moment des faits parce qu’elle était très portée sur les traditions, s’approcha du petit intrus dans les cordes, le souleva délicatement et le garda avec elle tout en repoussant ses congénères qui faisaient mine d’approcher.
Lorsque les membres de l’équipe médicale pénétrèrent dans l’enclos, la brave Binti se dirigea spontanément vers eux pour leur remettre l’enfant, probablement en leur recommandant d’être plus prudents la prochaine fois. Le petit être fut acheminé à l’hôpital dans un état de gravité jugé préoccupant, ce qui est, je suppose, un prix honnête à payer pour ne pas s’être préoccupé à temps de la gravité.
Le petit se rétablit rapidement et quitta l’hôpital quatre jours plus tard. Quant à la loyale Binti, elle profita plusieurs mois durant d’une nourriture supérieure et devint la coqueluche du pays, générant un conséquent afflux de visiteurs qui aura probablement poussé la direction à se demander comment faire tomber plus souvent des enfants dans l’enclos.
Et n’allons pas croire que ceci s’avéra être un cas isolé : en 1986, c’était Jambo, dos argenté d’un zoo du New-Jersey, qui porta secours à un garçon de cinq ans qui s’était lui aussi arrangé pour finir au fond de la fosse. Le puissant singe s’était interposé entre le jeune homme hors service et le reste de la troupe, avant de mener les siens dans leur abri pour laisser les secours approcher lorsque le petit eut repris connaissance.
Peut-être pensez-vous à ce stade que ces bêtes mériteraient qu’on leur élève des statues, eh bien c’est exactement ce qu’ils on fait. Mesdames et messieurs, voici Jambo, Protecteur des Enfants Imprudents et Inconscients :
Le cochon qui s’avéra finalement être un beau cadeau
Si l’on avait le droit de pousser les sots dans des fosses à gorilles, ceux qui offrirent un porcelet vietnamien à une citadine américaine pour son anniversaire auraient du souci à se faire ; l’adorable petit mammifère était en effet promis à atteindre un gabarit considérable et il était hors de question pour la jeune femme de le ramener chez elle.
Aussi, la jeune truie, nommée Lulu, finit-elle chez Jo Ann et Jack Altsman, les parents de l’heureuse propriétaire, fermiers de profession qui avaient largement la place et les ressources pour s’en occuper.
Ils ne s’en plaignirent pas : Lulu leur offrit des trésors d’affection et la maisonnée résonna constamment de grognements joyeux et de rires porcins. Mais un an plus tard, alors que la bête était passée de 2 à 75 kilos, et ne comptait pas s’arrêter là, le danger fut sur le pas de porte des Altsman ; Lulu revêtit sa cape et son chapeau à plume.
En effet, le 4 août 1998, Jo Ann fut frappée par une crise cardiaque et s’écroula. Jack étant à la pêche, il ne restait que les animaux pour prévenir le drame. Ils ne perdirent pas de temps : le chien (peut-être votre vieux labrador) aboya comme un con pendant que Lulu se précipita hors de la maison par la chatière, se blessant au passage et au ventre, pour aller s’allonger sur la route.
Après un certain nombre d’automobilistes qui réagirent en disant « tiens, un cochon » puis en effectuant une manœuvre d’évitement, il s’en trouva un pour s’arrêter et suivre la bête jusqu’à la ferme, où il prit conscience que quelqu’un avait besoin d’aide (en ce que quelqu’un lui cria « j’ai besoin d’aide » à l’intérieur de la maison). Il appela une ambulance et Jo Ann fut sauvée, à quinze minutes près si l’on en croit les docteurs.
Aujourd’hui, Jo Ann et Lulu vont bien, l’une ayant récupéré de son infarctus et l’autre dépassé les 150 kilos. La brave truie devint pendant pas mal de temps une héroïne nationale, passa plusieurs fois à la télé et, ce n’est pas une blague, se lia d’amitié avec Georges Clooney, lui-même propriétaire d’un animal de la même espèce.
Enfin, je dis « aujourd’hui », mais mes sources datant de 2002, la gentille Lulu est probablement morte à l’heure qu’il est. Mais vous savez quoi ? Votre labrador aussi.
Des lions sauvent une fillette d’un kidnapping
Soyez honnêtes : le jour où vous êtes embarqués dans un combat vraiment inégal et que vous pouvez choisir quel animal vous portera secours, le lion figurera forcément dans le haut de la liste. Ses 200 kilos de puissance nonchalante compteront à coup sûr pour quelque chose dans la bagarre.
Et c’est encore plus vrai si vous êtes une Éthiopienne de douze ans ; en 2005, une fillette est kidnappée à la sortie de l’école par sept hommes et emmenée en captivité, où elle sera battue pour l’enjoindre à reconsidérer son refus à un mariage (devant Dieu) avec l’un de ses ravisseurs.
Sans vouloir leur chercher des excuses, la situations des malfrats était compliquée ; il leur fallait garder la petite avec eux le temps qu’elle développe un syndrome de Stockholm, tout en évitant la police lâchée à leurs trousses. Aussi, ils se voyaient régulièrement forcés de changer de planque.
Toutefois, ce n’est pas la police qui mettra un terme à leur cirque ; après une semaine de cavalcade, alors que les kidnappeurs trimbalaient comme de coutume leur prisonnière vers une de leurs cachettes, ils eurent la plaisante surprise de voir toute une foutue horde de lions leur tomber sur le museau.
Enfin, par horde, j’entends trois lions, ce qui est déjà pas mal. Bien assez pour mettre les gus en fuite : leur demande en mariage ayant trouvé avec les félins une réponse parfaitement adaptée à leur vision du romantisme, les hommes s’éparpillèrent dans la savane en pleurant leur amour perdu. Quatre d’entre eux seront arrêtés peu après.
Chose incroyable, les lions montèrent la garde environ une demi-journée autour de la fillette sans même en prendre une seule morse ; ce n’est que lorsque les forces de police approchèrent que les bêtes levèrent le camp, laissant la victime aussi indemne qu’elle était (à savoir pas tant que ça) lorsqu’ils l’avaient trouvée.
Encore aujourd’hui, l’histoire suscite des doutes ; en effet, « normalement, les lions mangent les gens » nous apprend le sergent Wondimu tandis que le fantôme de Lapalisse lui adresse un clin d’œil. Toutefois, malgré son incrédulité, il ne peut qu’attester de la véracité de l’histoire puisqu’il était lui même à la tête de la troupe qui avait récupéré la jeune fille, terrifiée et choquée, mais pas mangée.
D’après des experts très déterminés à briser notre vision Simba-esque de la nature, il se pourrait que la petite ait été sauvée par ses propres pleurs, que les félins auraient rapprochés aux miaulements de leur progéniture (c’est con un lion). Donc maintenant, vous saurez quoi faire si un jour vous en avez un en face.